Les agents du contrôle du spectre de l’ANFR restent mobilisés sur le terrain pour résoudre les brouillages critiques et assurer la continuité des réseaux hertziens concourant au bon fonctionnement de l’État, des activités économiques, de sécurité et de santé.
Quel est votre rôle en tant que technicien?
Mon travail c’est de rétablir les communications quand ça ne fonctionne plus. J’instruis les cas qui nous sont signalés dans la région des Hauts-de-France. Je dois identifier et localiser la cause de perturbation qui peut aussi bien impacter les particuliers que les professionnels : la direction de l’Aviation civile, la Gendarmerie nationale, les pompiers… Les perturbations peuvent affecter la réception télé, les communications mobiles, les communications de secours mais également le signal GPS ou Galileo utilisé pour la géolocalisation ou la synchronisation par de multiples applications dont notamment le transport aérien.
Quelles sont vos missions ?
Mon quotidien est rythmé par l’aspect technique d’une part, et l’aspect relationnel d’autre part. Avant de partir en intervention pour identifier la source de brouillage, je prépare mes dossiers, je vais glaner les informations, joindre les personnes concernées, étudier la zone d’intervention, préparer les équipements… Une fois sur le terrain, je recherche la cause du brouillage, ce qui peut prendre quelques minutes, des heures voire des jours.
Je suis en contact avec de nombreux interlocuteurs, de l’opérateur téléphonique aux forces de l’ordre en passant par le sénior qui ne peut pas téléphoner à ses proches. Mon discours doit donc s’adapter à chacune de ces personnes, je dois installer une relation de confiance, faire preuve de pédagogie, mais aussi de fermeté lorsque c’est nécessaire. On résout les problèmes des uns tout en ménageant les autres. Chaque situation est différente et on s’adapte.
En cette période de confinement, comment vous organisez-vous ?
Je fais autant de télétravail que possible, en continuant notamment à me former et en préparant mes dossiers, mais je continue mes missions de résolutions de brouillages sur le terrain. L’Agence est sollicitée en ce moment sur des cas urgents et il y en pas mal en cette crise sanitaire, mais j’interviens aussi lorsque l’intervention ne nécessite aucun contact physique comme par exemple pour des cas de problèmes de réception TV ne nécessitant pas de rentrer dans des domiciles. Lors de mes déplacements j’applique les gestes barrières et les préconisations sanitaires. Je dispose de gel hydroalcoolique, de gants, je désinfecte les appareils… Grâce au renvoi d’appel téléphonique, on répond toujours aux questions des particuliers qui appellent l’antenne de Boulogne-sur-Mer. Le travail d’équipe avec mes collègues est lui aussi indispensable à mes missions au quotidien.
Comment appréhendez-vous le fait de devoir continuer à travailler dehors ?
Notre mission est importante et d’autant plus en cette période particulière. On montre aux particuliers et aux acteurs permettant au pays de fonctionner que nous sommes présents. Et puis, la télévision, le téléphone, la radio et les moyens de communication en général, sont des besoins essentiels. En assurant leur continuité on permet de maintenir le lien social entre les citoyens. On continue d’agir malgré les contraintes, le climat d’inquiétude qui règne fait simplement qu’on travaille différemment.
Etes-vous récemment intervenu sur un cas de brouillage atypique ?
Ce brouillage qui a nécessité quatre interventions nous a donné du fil à retordre. Plusieurs brouillages successifs ont impacté à Roubaix deux opérateurs mobiles et au total une trentaine de sites émettant en 3G et en 4G. Ces cas ont démarré en décembre 2019 et été définitivement résolus fin mars 2020, en période de confinement.
Le premier signalement était émis par un opérateur mobile fin décembre 2019, suivi par un autre signalement début janvier 2020 par un autre opérateur. Au total une trentaine de sites étaient touchés. Lors de nos premiers déplacements en janvier, nous avons constaté que le brouillage provenait d’équipements RFID (radio-identification) et plus précisément de lecteurs de badges permettant le contrôle d’accès des véhicules à un bâtiment administratif. Le matériel était mal configuré et n’émettait pas dans les bonnes fréquences, brouillant ainsi les stations 3G et 4G des opérateurs. Après avoir contacté un responsable du centre administratif qui est selon a loi garant de l’utilisation conforme des fréquences de son système RFID et est responsable si son équipement est à l’origine d’un brouillage, celui-ci nous a mis en relation avec l’installateur du matériel. Ce dernier a pu correctement régler son équipement, ce qui a été confirmé par les opérateurs. Les deux brouillages étaient résolus.
Cependant, en mars, un des opérateurs a de nouveau signalé des brouillages sur dix de ses sites 4G. Lors d’une nouvelle intervention de l’ANFR sur le terrain, il a vite été constaté que le système RFID était encore en cause. Il a donc été demandé d’éteindre définitivement le lecteur de badge, ce qui a soi-disant été fait. Pourtant, les communications mobiles étaient toujours perturbées ! Un quatrième et dernier déplacement, en pleine période de confinement, a été nécessaire pour arrêter nous-même le système avec l’aide d’un responsable du centre administratif. L’opérateur a enfin confirmé que le brouillage a cessé.
L’ANFR a appliqué au centre administratif, détenteur du système RFID incriminé, la taxe de 450€ pour frais d’intervention et un procès-verbal sera rédigé pour être transmis au Procureur de la République, lequel se chargera de la suite de dossier. La personne responsable risque jusqu’à 30 000€ d’amende et six mois d’emprisonnement.
Pouvez-vous brièvement raconter votre parcours ?
Originaire de Nancy, j’ai d’abord fait un BEP et un bac en électrotechnique, puis j’ai entrepris une licence professionnelle en technologie avancée de l’électronique des communications à Calais. C’est dans ce cadre que j’ai connu l’ANFR puisque j’y ai effectué mon stage en 2010 à l’antenne de Boulogne-sur-Mer avec l’unique technicien du site. J’ai ensuite quitté la région pour occuper mon premier poste dans le monde des télécoms à Toulouse. J’étais spécialisé dans les faisceaux hertziens : montage, programmation, qualification technique… Après deux ans et demi j’ai retrouvé l’ANFR, mais à Villejuif (94) cette fois. Au bout d’un an je suis retourné dans la région des Hauts-de-France dont j’appréciais la qualité de vie, et plus précisément à l’antenne de Boulogne-sur-Mer. En 2014, j’ai ainsi remplacé mon ancien maître de stage qui partait à la retraite.
En savoir plus sur la RFID et les règles d’utilisation de fréquences
Les dispositifs d’identification par radiofréquence (RFID) sont des systèmes de communication utilisés pour mémoriser et récupérer des données à distance en utilisant des dispositifs radio. Ces derniers sont fixés à des objets et des émetteurs/récepteurs qui activent les étiquettes et reçoivent des données en retour. Les radio-étiquettes comprennent une antenne associée à une puce électronique qui leur permet de recevoir et de répondre aux requêtes radio émises depuis l’émetteur-récepteur.
Des canaux de fréquences aux environs de 865 MHz sont destinés aux dispositifs RFID. L’utilisation de ces fréquences ne nécessite pas de demande individuelle d’utilisation car elles sont couvertes par un régime d’autorisation générale. Cependant, il existe bien des règles à respecter car il s’agit d’un droit collectif d’utilisation et qu’elles ne doivent pas perturber les autres systèmes utilisant la même fréquence. Des conditions techniques restrictives s’appliquent en termes de puissance d’émission et de canaux utilisés. Aussi, les équipements RFID, comme tout équipement radioélectrique, doivent être conformes à la réglementation européenne et notamment posséder le marquage CE
Le détenteur d’un équipement radio RFID est garant de l’utilisation conforme des fréquences et est responsable si son équipement est à l’origine d’un brouillage. L’utilisateur d’un équipement dans des conditions non conformes responsable d’un brouillage est redevable d’une taxe de 450€ pour frais d’intervention (loi de finances). Il encourt par ailleurs des sanctions pénales qui peuvent aller jusqu’à six mois d’emprisonnement et 30 000€ d’amende (code des postes et communications électroniques).