T’es où toi ? TDOA !

12 décembre 2024
Un rôle essentiel de l'ANFR consiste à contrôler la bonne utilisation des fréquences, notamment lors de « grands évènements », qu’ils soient sportifs, politiques ou même technologiques : tournoi de Roland-Garros, 24 Heures du Mans, sommets internationaux, défilé du 14 Juillet, salon Viva Technology... En effet, ces évènements donnent lieu à une utilisation intensive de fréquences temporaires par les acteurs des médias, de l’événementiel ou de la sécurité.

Pour remplir cette mission sur le terrain, il importe de pouvoir localiser tous les émetteurs actifs sur le site concerné, qu’ils soient autorisés ou non. L’Agence utilise depuis plusieurs années le procédé TDOA (time difference of arrival), qui lui permet d’identifier instantanément l’ensemble des fréquences utilisées et surtout de repérer d’un seul coup d’œil sur une carte le point de départ d’émissions non autorisées, donc d’éventuels brouilleurs.

Quel est le principe de la localisation TDOA ?

Le TDOA consiste à localiser les signaux en comparant le délai qu’ils mettent à atteindre plusieurs capteurs implantés à différents endroits sur le site. Il faut pour cela disposer d’au moins 3 récepteurs : schématiquement, il s’agit de lancer un chronomètre lorsque le signal est détecté dans le premier récepteur, puis de relever le temps qu’il a mis pour parvenir au deuxième, puis au troisième. Après quelques constructions géométriques, on peut en déduire le lieu d’où le signal a été émis. Mais, bien sûr, c’est un peu plus compliqué que cela dans la vraie vie : les signaux se propagent à une vitesse proche de celle de la lumière et, surtout, ils sont aussi souvent déformés ou démultipliés par l’environnement…

 

Tout d’abord, pour que l’on puisse isoler des séquences reconnaissables, il faut bien sûr que les signaux contiennent un minimum d’informations. C’est pourquoi le procédé TDOA fonctionne mal face à des porteuses stables. Inversement, plus le signal module un grand nombre de fréquences, plus la probabilité d’identifier des séquences uniques s’accroît : la précision de la localisation TDOA augmente donc avec la largeur de la bande utilisée par l’émetteur.

 

Il faut également qualifier l’environnement, en déter­minant par des procédés mathématiques de corrélation la dif­férence statistique des temps d’arrivée des signaux entre deux récepteurs. Cette valeur, associée aux coordonnées géo­graphiques des récepteurs, livre la base pour les calculs ultérieurs de toutes les positions possibles d’un émet­teur. Reportées sur une carte, ces positions se situent sur une branche d’hyperbole. Ensuite, le calcul est répété pour une deuxième paire de récepteurs et, le cas échéant, pour toutes les paires de récepteurs supplé­mentaires. Le point d’intersection des hyperboles représente l’emplacement probable de l’émetteur.

 

Enfin, comme les ondes électromagnétiques se propagent dans l’air à une vitesse proche de celle de la lumière, il leur suffit de 3 nanosecondes (10-9 s) pour parcourir environ 1 m. Il est donc nécessaire de disposer d’une précision du même ordre pour discriminer les temps d’arrivée. C’est pour cette raison que l’on utilise des récepteurs GNSS, qui fournissent un horodatage issu d’horloges atomiques, bien adapté à la précision utile à nos agents dans la localisation des sources.

 

Concrètement, à quoi ça sert ?

En fournissant aux intervenants en charge de la surveillance du spectre une pré-localisation de la source potentielle d’émission, immédiatement visible sur un écran d’ordinateur, cet outil permet de réduire considérablement le temps de recherche pour obtenir la situation précise d’un émetteur ou d’une source radioélectrique. En outre, il maximise les chances pour nos agents assermentés de prendre un intrus en flagrant délit : en effet, il était fréquent, avant l’emploi du TDOA, que la seule vue d’une personne traversant un site, antenne directive en main, provoque aussi sûrement l’arrêt du brouilleur que l’apparition d’un képi le long d’une départementale réduit la vitesse des automobilistes !

 

Le concept de base des localisations TDOA n’est certes pas nouveau. Mais, comme les signaux sont émis dans des bandes de plus en plus larges, comme les récepteurs sont désormais compacts et faciles à positionner, et comme l’infrastructure informatique des sites événementiels est de plus en plus performante, la mise en œuvre du TDOA est désormais facilitée. Ces systèmes matériels et logiciels avancés constituent ainsi un atout majeur dans l’amélioration continue des performances du dispositif de contrôle de l’ANFR, présent depuis plusieurs années lors de grands événements, et qui a culminé lors des Jeux Olympiques de Paris.