Saga CMR – point 1.8 : Utilisation du service fixe par satellite pour des applications de contrôle et commande d’avion sans pilote
Que s’est-il passé lors des CMR précédentes ?
Lors de la CMR-12, une étude avait été réalisée pour évaluer les besoins de fréquences et les mesures réglementaires envisageables pour le lien de contrôle-commande d’aéronefs sans pilote et pour le relais des communications de contrôle du trafic aérien. La CMR-12 avait alors décidé d’attribuer les bandes 5 000-5 091 MHz et 5 030-5 091 MHz au service mobile aéronautique (R) par satellite. Ces deux attributions étaient accompagnées de dispositions règlementaires et techniques pour diverses sous-bandes de fréquence. Toutefois, lors de cette même CMR, les États-Unis avaient également demandé la possibilité d’utiliser les attributions au service fixe par satellite (SFS) dans les bandes Ku et Ka avec des satellites géostationnaires pour le contrôle-commande des aéronefs sans pilote dans les espaces aériens non réservés. En effet, les bandes nouvellement attribuées ne seraient pas exploitables avant plusieurs années en l’absence de satellites préexistants susceptibles de les utiliser et, à l’époque, ce lien contrôle-commande sous attribution SFS était déjà utilisé dans les espaces réservés. Il ne restait donc qu’à identifier les conditions nécessaires pour étendre cet usage du SFS aux espaces non réservés, l’objectif étant de garantir la sécurité d’aéronefs évoluant dans un même espace et pilotés, soit à bord, soit à distance.
A la demande de l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI), la CMR-15 a ensuite adopté la Résolution 155 pour réglementer cet usage. Ainsi, l’OACI pouvait inclure des liaisons utilisant le SFS dans les normes et pratiques internationales recommandées (standards and recommended practices : SARPs) pour les aéronefs sans pilote. Cette Résolution prévoyait également « d'examiner la présente Résolution à la CMR-19, en tenant compte des résultats de la mise en œuvre de la Résolution 156 (CMR-15), et de prendre les mesures nécessaires, selon qu'il conviendra ».
La CMR-19 a simplement actualisé les valeurs du masque de densité de flux de puissance (power flux density : pfd) pour assurer la protection du service fixe (cf. figure ci-dessus) mais a de nouveau inscrit un point à l’ordre du jour de la CMR-23 dans sa Résolution 171 (CMR-19).
Application de la résolution 171 (CMR-19)
Lors de la préparation de la CMR-23, les dispositions de la Résolution 155 (Rév. CMR-19) ont été revues en détail. Elles sont proches de celles définissant la protection des autres services lors de la mise en œuvre des stations terriennes en mouvement (ESIM) soulèvent aussi la question de la protection de stations montées sur un aéronef sans pilote. Plusieurs points ont fait l’objet de débats :
- l’application d’un masque de pfd pour la protection des services de Terre, à l’instar de ce qui est retenu pour les ESIM ;
- le fait que l’article 4.10 relatif à la sécurité ne puisse être invoqué pour les attributions du SFS, évitant ainsi un impact défavorable sur les accords de coordination entre réseaux SFS et sur les stations des services de Terre.
En parallèle, l’OACI a élaboré des SARPs pour le contrôle-commande des aéronefs sans pilote à bord. Un premier ensemble de normes a été adopté, un second, plus détaillé, reste en cours de développement pour une mise en application au plus tôt en 2026. Le sujet de la liaison de contrôle-commande devient ainsi un nouvel enjeu pour les aviations civiles. Un nouveau concept, celui d’exigence de performance de lien (required link performance : RLP), a ainsi été introduit pour disposer d’une référence indépendante de la technologie (en direct, ou via satellite ou relais) et de la bande de fréquence. Ce concept soulève plusieurs questions, car les analyses de sécurité doivent être suffisamment détaillées pour chaque cas d’usage.
Et maintenant ? Point sur la CMR-23
Les positions demeurent partagées entre administrations. Certaines proposent la suppression de la Résolution 155 parce qu’elles exigent que l’article 4.10 soit appliqué ou parce qu’elles s’inquiètent de l’impact de ces usages sur les autres usages SFS et sur les stations de Terre. La France ainsi que plusieurs nations européennes et d’autres Régions proposent quant à elles une révision de la Résolution 155 en laissant le soin à la communauté aéronautique de prendre les mesures adéquates de sécurité, indispensables pour que le SFS puisse être utilisé pour le lien de contrôle-commande. Pour tenir compte des exigences de sécurité aérienne, la France demandera, en plus des principes évoqués précédemment, dans la partie relative aux « reconnaissants » de la révision :
- que l’application de l’article 4.10 soit considérée par l’OACI comme un aspect contribuant à la sécurité et que l’utilisation du SFS sans application de l’article 4.10 soit assujettie à une décision de l’État responsable de l’espace aérien dans lequel le drone opère ;
- que la supervision de fournisseurs de service du lien SFS soit de la responsabilité de l’État de l’opérateur du drone ;
- que l’usage du SFS pour les liens de contrôle-commande n’exclue pas les autres solutions disponibles faisant appel à d’autres types d’attributions, et même invite à utiliser en priorité celles spécifique à l’aviation civile ;
- que les futurs accords de coordination entre opérateurs SFS au sien de l’UIT-R selon le processus défini par le R.R. puissent impacter la possibilité d’utiliser certaines liaisons SFS sur le long terme.