Le soleil sous haute surveillance… depuis la France !

12 novembre 2020

Le <link publications dossiers-thematiques station-de-radioastronomie-de-nancay>site de radioastronomie de Nançay (Sologne, France) est doté de deux instruments principaux : le radiohéliographe (150-450 MHz) et le réseau décamétrique (20-70 MHz). Ils observent, par le biais de mesures interférométriques, le soleil dans le domaine des radiofréquences.

Qu’est-ce que le radiohéliographe ?

Le radiohéliographe est, à ce jour, l’un des seuls instruments au monde à cartographier de façon régulière la couronne solaire à des altitudes jusqu’à un demi rayon solaire au-dessus de sa surface. Autrement dit, il fournit des informations essentielles sur le couplage qui existe entre la couronne solaire et l’espace interplanétaire. Il fournit un appui précieux aux programmes spatiaux d’observation de notre étoile, que ce soit le Parker Solar Probe de la NASA, déjà en route vers le Soleil, ou le Solar Orbiter (programme ESA/NASA) dont le lancement a eu lieu le 10 février 2020. Le radiohéliographe contribue notamment à acquérir et à fournir des données dans des bandes que les sondes spatiales ne peuvent observer. 

Le radiohéliographe, dans son ensemble, est composé de 47 antennes en deux branches perpendiculaires en forme de T (voir Figure 3 – 19 antennes Est-Ouest, 27 antennes Nord-Sud). Les antennes composant le réseau ne sont pas toutes identiques :

  • les antennes du réseau Nord-Sud sont des paraboles de 5 mètres de diamètre ;
  • les antennes du réseau Est-Ouest sont principalement des antennes « lunette » : dipôles épais et repliés, sensibles à une gamme de fréquences chacun, montés devant une grille qui empêche l’entrée du rayonnement depuis la direction opposée au Soleil, associées à 4 paraboles (deux de 10 m. de diamètre, une de 7,50 m. et une de 5 m.)


Toutes les antennes sont motorisées pour suivre en continu le soleil durant 7 heures par jour. Le traitement des signaux enregistrés permet de réaliser une image « radio » de la couronne solaire et des sources sporadiques qui apparaissent notamment lors des éruptions. Son avantage est qu’il présente une excellente résolution temporelle atteignant plusieurs images par minutes, permettant d’avoir une analyse détaillée du comportement et de l’évolution de l’éruption.  Chaque fréquence permet de réaliser des images dans une couche particulière du soleil.

Photo du réseau Nord-Sud (à gauche) et vue depuis l’espace (Google Earth) de l’ensemble de l’interféromètre de Nançay

Qu’est-ce que le réseau décamétrique ?

Le réseau décamétrique forme aussi une imposante structure. Il est constitué de 144 antennes (de type « Tee-Pee ») de formes hélicoïdales atteignant près de 9 mètres de hauteur, de 5 mètres de diamètre de base et inclinées de 20° par rapport au zénith. Ces antennes sont réparties sur une surface de 7 000 m². Ce réseau fonctionne à des fréquences 5 à 10 fois inférieures à celles du radiohéliographe et contrairement à ce dernier, il ne fournit pas d’image de l’étoile. Il ne fait que mesurer le flux global émis en analysant l’intensité et la polarisation du signal à de nombreuses fréquences du haut de la bande HF vers le bas de la bande VHF.

Photo du réseau décamétrique en hiver

Les observations effectuées dans le domaine radio basse fréquence sont tout aussi importantes que celles produites dans d’autres bandes. Dans ce domaine de fréquences, au moins deux phénomènes sont observables et quantifiables :

  • l’évolution de la couronne solaire, qui permet d’observer l’éjection de matière dans l’espace interplanétaire connue sous le nom d’éruption solaire. La couronne solaire présente une forme très irrégulière contrairement à la sphère visible du Soleil ;
  • l’évolution du champ magnétique solaire.


Lors d’une irruption solaire, on constate  l'apparition d’aurores polaires dues à l’interaction avec le champ magnétique terrestre et la haute atmosphère. Au-delà des conséquences qu’elles peuvent avoir sur les systèmes de radiocommunication (brouillages), elles  peuvent créer directement des dommages sur les matériels par l’émission de fortes doses de particules ionisantes, mais aussi sur les êtres vivants, notamment sur les astronautes ou les personnels navigants de l’aviation civile.  La surveillance de notre étoile est aussi un enjeu sanitaire et économique.

Lors de la prochaine Conférence mondiale des radiocommunications de 2023, un point de l’ordre du jour visera à reconnaitre l’utilisation du spectre pour cette « météorologie spatiale ».  Les premières études en cours à l’UIT ont identifié un grand nombre de bandes de fréquences où les observations sont effectuées sans reconnaissance ni protection dans le règlement des radiocommunications.