Saga CMR-23 : Point 1.14 - exploration de la Terre dans la bande 240 GHz
En effet, un nouveau capteur, ICI (Ice Cloud Imager), a été développé par l’ESA et doit être intégré aux nouveaux satellites METOP SG de la deuxième génération des missions polaires d’EUMETSAT (EPS-SG). Trois paires de satellites se succèderont, chaque paire présentant une durée de vie de 7 ans, soit une durée de mission de 21 ans. Ces satellites devraient adopter une orbite héliosynchrone, à l’altitude moyenne de 832 km.
Le capteur ICI
Les observations du radiomètre ICI se font sur 11 canaux répartis entre 183 et 664 GHz (cf. Tableau 1). C’est un radiomètre de type « conical scan » : son capteur tourne à une vitesse qui maintient une élévation fixe par rapport au nadir du satellite. Le capteur ne devrait être installé que sur l’un des satellites de chaque paire (METOP-SG B), qui embarque aussi d’autres radiomètres (MWI – Micro Wave Imager, SCA - Scatterometer, RO - Radio Occultation sounder) ainsi qu’une charge utile ARGOS-4. Le radiomètre MWI complète les observations en analysant 18 canaux entre 18 et 183 GHz. L’association de MWI et ICI recueillera ainsi un ensemble inédit de mesures passives entre 18 et 664 GHz.
Canal | Fréquences | Largeur de Bande | Polarisation | NEΔT | Max bias | Elévation | Azimut | |
Nom | ID | (GHz) | (GHz) | (K) | (K) | Offset (∘) | Offset (∘) | |
ICI-1V | 1 | 183.31 ± 7.00 | 2 | V | 0,8 | 1 | −0.780 | 0 |
ICI-2V | 2 | 183.31 ± 3.40 | 1,5 | V | 0,8 | 1 | −0.780 | 0 |
ICI-3V | 3 | 183.31 ± 2.00 | 1,5 | V | 0,8 | 1 | −0.780 | 0 |
ICI-4V | 4 | 243.20 ± 2.50 | 3 | V | 0,7 | 1,5 | 0,711 | −3.398 |
ICI-4H | 5 | 243.20 ± 2.50 | 3 | H | 0,7 | 1,5 | 0,731 | 3,385 |
ICI-5V | 6 | 325.15 ± 9.50 | 3 | V | 1,2 | 1,5 | −0.822 | −2.226 |
ICI-6V | 7 | 325.15 ± 3.50 | 2,4 | V | 1,3 | 1,5 | −0.822 | −2.226 |
ICI-7V | 8 | 325.15 ± 1.50 | 1,6 | V | 1,5 | 1,5 | −0.822 | −2.226 |
ICI-8V | 9 | 448.00 ± 7.20 | 3 | V | 1,4 | 1,5 | −0.822 | 2,24 |
ICI-9V | 10 | 448.00 ± 3.00 | 2 | V | 1,6 | 1,5 | −0.822 | 2,24 |
ICI-10V | 11 | 448.00 ± 1.40 | 1,2 | V | 2 | 1,5 | −0.822 | 2,24 |
ICI-11V | 12 | 664.00 ± 4.20 | 5 | V | 1,6 | 1,5 | 0,752 | −1.367 |
ICI-11H | 13 | 664.00 ± 4.20 | 5 | H | 1,6 | 1,5 | 0,875 | 0,941 |
Les fréquences, 183,31, 325,15 et 448 GHz correspondent à trois transitions quantiques de la vapeur d’eau. Les bandes 243 et 664 GHz seront plutôt utilisés pour des mesures de continuum, c’est-à-dire des mesures de température de brillance. La Figure 1 montre que l’absorption de l’atmosphère est importante dans les bandes de transitions tandis que les bandes 243 et 664 GHz présentent des maxima de température de brillance de l’atmosphère et une sensibilité importante à la taille des particules présentes dans l’environnement observé. Le capteur devrait ainsi permettre une observation détaillée des nuages, de leur composition et de leur masse en glace.
Les canaux d’ICI dans le RR
La bande 183 GHz (bande 182-185 GHz) est protégée par le renvoi RR No 5.340 (« toutes les émissions sont prohibées »). Pour les bandes au-dessus de 275 GHz, le tableau de répartition des fréquences n’a pas d’attribution mais le renvoi RR No 5.565 liste certaines bandes de la gamme 275-1000 GHz identifiées par les administrations pour des applications passives : on y retrouve la bande 325 GHz (313-356 GHz), ainsi que 448 GHz (439-467 GHz) et 664 GHz (657-692 GHz). Si ces observations passives restent à ce jour exemptes d’interférence, c’est principalement du fait de l’absence d’applications actives au-dessus de 275 GHz. En revanche, au-dessous de 275 GHz, des projets existent d’applications des services fixe, mobile voire même fixe par satellite. C’est pour cette raison que les agences spatiales demandent une attribution de l’EESS pour protéger le canal autour de 243 GHz.
Les négociations à l’UIT et à la CEPT
Les premières études présentées par l’ESA et EUMETSAT ont permis de circonscrire les besoins d’attribution de l’EESS entre 244,2 et 247 GHz d’une part et dans 239,2 à 242,2 GHz d’autre part (3 GHz de bande par canal comme requis, cf. Tableau 1).
Par la suite, des études de compatibilité ont été proposée par l’ESA, EUMTSAT puis la NASA pour évaluer l’impact que la protection de l’EESS passif aurait sur des services actifs dans les deux bandes de fréquences étudiées. La bande 244,2-247,2 GHz est rapidement apparue sans aucun problème de comptabilité pour l’EESS : il n’existait pas d’équipements déployés ou planifiés correspondant au service de radiolocalisation attribué dans la bande. Dans le cas de la bande 239,2-242,2 GHz, les études ont démontré que la comptabilité était envisageable entre l’EESS et le FSS descendant, attribué dans 239,2-240 GHz. Toutefois, l’attribution de l’EESS dans cette bande pourrait induire des contraintes fortes sur les attributions existantes pour les services fixe et mobile. Mais une solution a été identifiée. En effet, la bande 235-238 GHz, entre deux bandes attribuées aux services fixe et mobile (231,5-235 GHz et 238-239,2 GHz) est attribuée à l’EESS passif mais n’est utilisée que par des capteurs nommés « sondeurs de limbes », qui observent dans les strates horizontales de l’atmosphère : le capteur n’est pas dirigé vers le sol, mais vers l’horizon. Du fait de leur orientation, ces capteurs deviennent compatibles avec les services fixe et mobile. Il est donc proposé de déplacer les attributions pour les services mobile et fixe de la bande 239,2 - 241 GHz à la bande 235-238 GHz, où l’utilisation de l’attribution EESS sera limité à des sondeurs de limbes compatibles. Un très large bloc de spectre peut ainsi être dégagé, de 231,5 à 239,2 GHz, soit 9 GHz de spectre, favorable à l’émergence des applications associées. La figure 2 résume les modifications proposées.
Cette solution paraît pertinente et répond aux exigences de la Résolution 662 aux yeux de la France et de l’Europe. Néanmoins, certains États ne semblent pas totalement satisfaits, notamment les États-Unis, qui voient le déplacement des attributions pour les services fixe et mobile comme une contrainte, malgré l’absence d’utilisation commerciale à ce jour. D’autres s’inquiètent encore des risques de demandes futures de protection de l’EESS dans la bande 235-238 GHz, malgré les garanties apportées.
La Réunion de Préparation à la Conférence (RPC, du 26 mars au 6 avril) devrait être décisive et permettre d’affiner les propositions de changement règlementaire qui seront en discussion à la Conférence Mondiale des Radiocommunications.
Bibliographie