CBTC et WiFi : enfin un accord !

31 janvier 2025

A la découverte du CBTC…

Le CBTC (Communication-Based Train Control) est un système de communication et de signalisation ferroviaire destiné aux métros et trains de banlieue. Aujourd’hui, la communication entre une rame de métro et le centre de commandement en charge de la gestion du trafic se fait par ondes radio à 5,9 GHz. La caractéristique principale du CBTC est sa capacité à rendre automatique l’exploitation des trains, comme sur la ligne 1 du métro à Paris. Ce système critique bénéficie de redondances pour garantir la sécurité, avec notamment un doublement des points d’accès radio le long des voies et des modems à chaque extrémité du train. Cette architecture garantit une disponibilité élevée de la ligne en absorbant les aléas propres à tout système radio (interférences, pannes, etc.).

L’historique du CBCT

En France, les premières lignes de métro parisien équipées en CBTC utilisant la bande de fréquences 5,9 GHz ont été les lignes 3 (en 2010) et 1 (en 2011). Depuis, le CBTC s’est répandu en France, dans les métros de Rennes, Lyon, Lille et Marseille, mais aussi en Europe, par exemple à Copenhague ou Bruxelles, et prochainement à Vienne ou Francfort.

Ce n’est qu’en mars 2020 que l’usage du CBTC dans la bande de fréquences 5 915-5 935 MHz a été harmonisé par la CEPT, puis en octobre 2020 par la Commission européenne, soit 10 ans après la mise en service de la première ligne CBTC européenne. En novembre 2020, la CEPT a également harmonisé la bande de fréquences 5 945-6 425 MHz pour les RLAN (en pratique, WiFi et Bluetooth), et cette harmonisation a été entérinée par la Commission européenne en juin 2021.

Observations et ajustements

Avant toute harmonisation, la CEPT vérifie la bonne coexistence entre applications radioélectriques voisines en fréquence. Or, les appareils RLAN portatifs peuvent produire des émissions hors bande dont des études techniques ont montré, bien que les bandes de fréquences soient distantes de 10 MHz, qu’elles peuvent perturber les récepteurs CBTC, en particulier ceux embarqués à bord des métros automatiques. En cas de perturbation prolongée, le train pourrait alors s’arrêter et le trafic serait interrompu sur la ligne. Pour prévenir ce risque, un accord temporaire avait été trouvé entre administrations en 2020, consistant à imposer aux RLAN portatifs une limite des émissions hors bande de -45 dBm/MHz en-dessous de 5 935 MHz jusqu’au 1er janvier 2025. Ensuite, la limite devait être relevée à -37 dBm/MHz si des études complémentaires ne venaient pas confirmer le caractère approprié et proportionné des -45 dBm/MHz. Soit quatre ans pour y voir plus clair…

Mais les années passaient, sans qu’un consensus n’émerge ! L’ECC plénier de juin 2024 à Kristiansand a alors décidé de mettre en place un groupe de travail dédié, le CG VLP, présidé par Mme Andrea Mora (ANFR), pour évaluer si une solution déjà éprouvée ne pouvait pas convenir : en effet, aux Etats-Unis, des exigences techniques avaient été définies par la FCC pour protéger les ITS routiers en-dessous de la bande RLAN, et semblaient donner satisfaction. Elles sont au nombre de deux : utiliser prioritairement les canaux au-dessus de 6 105 MHz et mettre en œuvre un contrôle de puissance. Ces contraintes pourraient donc être simplement transposées pour protéger le CBTC en Europe. En outre, adopter les mêmes règles permettrait d’éviter une fragmentation du marché entre Amérique du Nord et Europe, qui demeure une préoccupation de l’industrie WiFi.

Travaux et accord

Grâce aux travaux du CG VLP, l’ECC plénier de novembre 2024 à Vienne a heureusement pu identifier une solution satisfaisant toutes les administrations, et notamment la France, qui exploite le CBTC depuis plus d’une décennie. Les appareils RLAN portatifs verront ainsi leur contrainte sur les émissions hors bande en-dessous de 5935 MHz relâchée à -37 dBm/MHz, à condition qu’ils sélectionnent en priorité les canaux au-dessus de 6 105 MHz. Sinon, la précédente limite de -45 dBm/MHz restera applicable. Un « considérant » précise que la mise en œuvre du contrôle de puissance par ces appareils sera en outre indispensable. Cette approche a été validée par les études menées par la RATP qui confirment en outre que donner la priorité aux canaux au-dessus de 6 105 MHz a un effet protecteur bien plus important sur la protection du CBTC que le contrôle de puissance.

Cet accord conclut brillamment les travaux sur la coexistence entre CBTC et RLAN 6 GHz, qui mobilisaient les gestionnaires européens des fréquences depuis mai 2017 ! Il est le fruit d’une collaboration étroite entre l’ANFR, la RATP, la SNCF et l’UITP, qui ont su notamment obtenir le soutien d’autres administrations dans le domaine ferroviaire, qui ont sensibilisé à leur tour les gestionnaires nationaux du spectre. Cette construction de consensus secteur par secteur, nation par nation, apparaît aujourd’hui de plus en plus nécessaire pour permettre des décisions efficaces dans ces domaines d’une complexité technique croissante : cette affaire a montré de manière exemplaire son efficacité.

Prudemment, la Commission européenne avait tout de même publié une décision prorogeant la limite de -45 dBm/MHz pour un an. Mais, dès que notre accord sera transposé dans une décision de la Commission européenne, le nouveau dispositif entrera en vigueur : sans doute avant mi-2025.