Brexit : quelles conséquences dans le monde des fréquences ?
Au lendemain du 23 juin 2016, date du referendum sur le Brexit, les « fréquenciers » européens ont appris avec stupeur les résultats et se sont inquiétés des conséquences dans leur domaine d’activité. En effet, la gestion des fréquences en Europe est un subtil équilibre entre :
- d’une part, la CEPT qui réunit 48 pays et où les États membres de l’UE ont un rôle prépondérant malgré l’influence de nombreux pays non membres de l’UE, dont certains très actifs, tels que la Suisse, la Norvège et la Russie ;
- d’autre part, l’harmonisation communautaire obligatoire, qui doit suivre le processus défini dans la Décision n° 676/2002/CE du Parlement européen et du Conseil et qui s’appuie justement sur les travaux de la CEPT.
La question qui était dans tous les esprits était donc la suivante : le basculement du Royaume-Uni en dehors de l’UE allait-il modifier cet équilibre ?
Le Royaume-Uni est écarté des décisions…
La traduction concrète de cette décision s’est faite au rythme du calendrier de retrait, de la phase de transition et maintenant du nouvel accord de coopération. Ainsi, lors de la conférence mondiale des radiocommunications de 2019 (CMR-19), le Royaume-Uni, toujours pays membre, devait défendre la position de l’UE. Pendant la phase de transition, ce pays devait mettre en œuvre le cadre communautaire, dont les décisions européennes adoptées sous la décision Spectre imposant des conditions techniques d’utilisation des fréquences dans un calendrier contraint à tous les États membres, sans avoir pu les négocier. Ce fut par exemple le cas de la révision de la décision sur la 5G dans la bande 26, GHz. Il ne participait plus à la construction européenne de la politique du spectre, bien qu’il ait présidé deux ans auparavant le RSPG, groupe en charge de ces questions et influençant la politique de la CE dans ce domaine. Aujourd’hui, le Royaume-Uni reste écarté de ces débats communautaires, mais n’est plus tenu de mettre en œuvre les décisions européennes d’harmonisation.
… mais conserve son influence.
Si le Royaume-Uni n’a plus droit de parole dans les instances communautaires, il conserve, par sa présence et son influence à la CEPT, un rôle significatif dans l’harmonisation technique des fréquences et la préparation des positions pour les conférences mondiales. Depuis 2016, il a d’ailleurs renforcé son rôle au sein de la CEPT pour conserver son influence dans les décisions communautaires. Il détient ainsi certaines positions clés, dont la présidence de l’ECC, organe décisionnel de la CEPT pour tout ce qui concerne les fréquences, et la vice-présidence du CPG, groupe européen de préparation des CMR, ce qui accroît son rôle par rapport à d’autres pays non-membres de l’UE, comme la Suisse, la Norvège ou la Russie.
Dans les prochains débats de la CEPT, le Royaume-Uni cherchera sans doute à maintenir sa proximité avec les pays de l’UE qui lui sont traditionnellement favorables. Néanmoins, les différends entre pays de l’UE seront en dernier ressort arbitrés au sein de l’UE, sans droit de regard pour le Royaume-Uni. Cela souligne une nouvelle fois l’importance de la bonne coopération au sein de l’UE, notamment avec l’Allemagne, mais aussi avec les pays du Benelux et ceux de la Méditerranée, pour le succès de nos positions. Bien sûr, comme dans d’autres domaines, il est également important de conserver de bonnes relations avec le Royaume-Uni. Au-delà du Brexit, les opposants d’hier peuvent devenir les alliés de demain !