Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur les antennes 5G

24 juillet 2020

Cet article devrait lever toutes les questions qu’un grand nombre se pose sur les antennes 5G. Avant de s’intéresser tout particulièrement à ces antennes, il convient de comprendre ce que représente un rayonnement électromagnétique (EM) et en quoi une antenne permet d’émettre ou de recevoir ces champs.

Les rayonnements électromagnétiques

La lettre de l’ANFR de Juillet 2019 (lien : Newsletter Météorologie) mentionnait et expliquait comment des satellites météorologiques captaient une partie des émissions électromagnétiques naturelles émises par certaines molécules ou par certains corps à une température donnée. Il existe en fait un grand nombre de façon d’émettre des champs électromagnétiques et tous ces champs sont liés à l’émission d’une particule nommée photon. Comme cela avait été présenté dans le Newsletter sur le graviton, à chaque interaction qui régit notre univers est associée une particule, si le graviton est la particule qui caractérise les champs gravitationnels, le photon est la particule qui caractérise le transport de l’énergie des champs électromagnétiques. L’émission de ces photons peut résulter :

  1. De modifications structurelles atomiques ou moléculaires (que la modification soit spontanée ou initiée comme dans la fusion ou la fission nucléaire) 
  2. De la mobilité des porteurs de charge(s) électrique(s), indépendamment du milieu considéré :
    a. L’agitation thermique: rayonnement de corps présentant une température supérieure à 0K (soit environ -273°C)
    b. La circulation dans le milieu : il peut s’agir de conducteur électrique (c’est dans cette dernière catégorie que ce range la plupart des émetteurs/récepteurs qui [envahissent] notre quotidien), tout comme de plasma (cas du rayonnement électromagnétique issu des arcs électriques issus de la foudre).
    c. L’accélération, par exemple le rayonnement (non thermique) synchrotron issu des pulsars.


Comment fonctionnent les antennes de radiocommunication ?

D’un point de vue général, les antennes de radiocommunication sont basées à ce jour, sur le principe de la circulation de charge le long d’un conducteur. Autrement dit, il est possible de formuler, que tout corps, quel qu’il soit, parcouru par un courant (qui définit en soi la circulation de charges nommées électrons) rayonne simultanément deux types de champs, l’un est dit électrique, l’autre magnétique. Bien qu’ils n’aient pas les mêmes propriétés, les équations de Maxwell, nous apprennent qu’ils sont indissociables l’un de de l’autre. Les variations temporelles de ces deux champs sont identiques à celles du courant qu’il lui donne naissance. Dans la mesure où l’on considère des variations temporelles des courants ou des champs, alors on introduit nécessairement la notion de fréquence. La notion de fréquence est assez simple à appréhender, il s’agit simplement du nombre d’ « oscillations de l’onde radio» durant 1 seconde. Pour obtenir une onde à 1GHz, un courant alternatif doit onduler 1 milliard de fois en 1 seconde. A cette fréquence est associée une longueur d’onde, que l’on pourrait définir simplement comme la longueur physique dans l’espace d’une oscillation. 

Lors de la réalisation d’antenne de radiocommunication, bien que ces champs soient interdépendants, il est possible de privilégier la réception de l’un ou de l’autre. Généralement le choix se fait sur la dimension de l’antenne à réaliser au regard de la fréquence du champ EM à produire ou à capter. On favorise davantage la conception d’antennes privilégiant la réception des champs magnétiques à basse fréquence et des champs électrique à hautes fréquences. En réalité, il serait plus juste de dire qu’à basse fréquence, les comportements des champs électriques et magnétiques sont discernables, ce qui n’est plus le cas en haute fréquence, ou seule la notion de puissance (comprise comme une densité de flux d’énergie assimilable au produit1 des champs électrique E ⃗ et magnétique H ⃗) devient prépondérante. 

En quoi les fréquences jouent-t-elle un rôle dans la conception d’une antenne ?  

Il faut d’abord distinguer deux types d’antennes :

  1. Le premier type inclut à la fois la formation du champ électromagnétique et la direction dans laquelle il doit être émis. Antenne dipôle, antenne patch, antenne à réseaux phasés, etc.
  2. Le second type produit le champ EM par l’intermédiaire d’une cavité et utilise un réflecteur pour guider le champ dans une direction privilégier : les antennes paraboliques


Par définition, si tout corps conducteur parcouru par un courant rayonne, son rayonnement est aussi optimisé par la dimension physique qu’il a au regard de la longueur d’onde à émettre ou à capter. C’est une propriété fondamentale. Il faut voir la longueur d’onde comme la longueur physique d’une oscillation de l’onde dans l’espace. Cette longueur est bien entendu, à une fréquence donnée, identique pour le champ électrique et magnétique. Il faut partir du principe que l’intensité du rayonnement du champ électrique est optimisée lorsque la longueur physique du conducteur rayonnant est égale à la moitié de la longueur d’onde. Dans ce cas précis, la surface métallisé présente un ventre de courant à sa surface (et de ventre de tension à ces extrémités) et on dit alors que le l’élément résonne ou entre en résonnance. Bien entendu, pour qu’une antenne émette un champ électromagnétique optimisé au regard de l’énergie électrique qui lui est fourni, elle ne doit pas répondre qu’à cet unique critère. D’autres effets sont à prendre en considération comme par exemple l’adaptation des impédances. On pourrait résumer cet effet comme une forme d’opposition du milieu aux passages du courant. Il faut généralement faire en sorte que cette opposition soit constante sur l’ensemble du parcours du courant jusqu’à l’antenne. Sinon une partie du courant va se réfléchir vers la source. 

Dans le cas d’une antenne parabolique, c’est l’émetteur (généralement une cavité résonnante), qui fait face à la parabole, qui produit le champ électromagnétique idéal. Le réflecteur n‘est là que pour orienter le faisceau dans une direction privilégiée. 

On  comprend ainsi pourquoi les antennes, en général, sont élaborées pour une gamme de fréquences d’utilisation particulière (fréquence centrale et bande passante). La longueur physique de l’élément ou des éléments rayonnants (qu’il s‘agissent de conducteurs ou de cavités) étant fixée dès la conception.  Il est bien entendu possible d’élargir leur gamme de fréquence d’utilisation dans une certaine mesure, en modifiant fictivement les propriétés de résonnance des conducteurs utilisés par exemple par l’emploi d’un substrat (servant de support à l’élément rayonnant) à plus grande permittivité que l’air ou encore en augmentant la largeur du conducteur. 

Champs rayonné et diagramme d’antenne

Lorsque qu’un champ est produit par un conducteur, il rayonne dans tout l’espace, c’est ce que l’on appelle son diagramme de rayonnement. Toutefois, il est possible de faire en sorte de privilégier les directions d’émission des champs.  Par exemple, l’ajout d’un réflecteur (mais encore de toute forme de métallisation connectée à la masse) derrière un conducteur résonnant permet de limiter son rayonnement à la partie supérieure et de minimiser le rayonnement derrière le plan métallique. Suivant la forme de ce réflecteur, on modifie l’énergie émise dans l’autre direction (plan de masse ou parabole). La mise en réseau de métallisation, comme dans le cas des antennes de réception hertziennes qui arborent nos toits permet aussi de privilégier la captation du rayonnement provenant d’une direction privilégiée et généralement celle dans laquelle le diffuseur se situe. Le diagramme de rayonnement de l’antenne est donc directement conçu pour répondre à l’utilisation que l’on fait de l’antenne. Lorsque l’on doit diffuser sur une large couverture (Radio, télévision, mobile) on va privilégier des antennes qui diffusent dans tout l’espace utile. Par exemple, les antennes 4G, produisent des rayonnements en forme de disque incliné, permettant de couvrir de large zone azimutale, tout en minimisant les émissions au-dessus de l’horizon où elles sont inutiles. En revanche un téléphone mobile 4G qui doit pouvoir capter et émettre dans tout l’espace, ne sachant pas où se situe le relais, aura tendance à privilégier des antennes qui diffusent dans l’ensemble de l’espace.  Enfin une station terrienne d’émission ou de réception satellitaire, privilégiera un rayonnement extrêmement intense dans une direction angulaire unique, celle où se  situe le satellite avec lequel elle souhaite communiquer, et dans ce cas les paraboles sont à ce jour les antennes les plus utilisées. 

Les antennes dites « actives » de la 5G c’est quoi ? 

Avant d’introduire les antennes de la 5G, il faut comprendre ce que l’on considère comme une antenne active. Elles sont nommées ainsi pour une raison simple : au lieu de produire un champ électromagnétique dans une direction fixe, leur faisceau est capable de balayer l’espace par des procédés topologiques et d’architecture électronique. Le concept d’antenne active, dite aussi antenne à réseau phasé,  existe depuis plusieurs décennies et a été largement utilisé (et continue à être utilisé) dans le domaine du radar. La téléphonie mobile a donc exploité un concept existant. De nombreux exemples de radars à réseaux phasés existent aujourd’hui, ils sont parfois de dimension réduite, embarqués sur des aéronefs, parfois gigantesques et conçus sur des façades de bâtiments. 

On peut dénombrer trois avantages aux antennes actives :

  1. leur faible épaisseur, rendant ces antennes planaires (elles peuvent être conçues sur n’importe quel type de surface). 
  2. un rayonnement variable dans chaque direction (au cours du temps) du fait de la rapidité de balayage (électronique) du faisceau. 
  3. leur grande directivité (directement proportionnelle au nombre d’éléments qui compose le panneau d’antennes) dans des directions d’intérêt. Cette directivité est une autre façon de décrire leur capacité à concentrer l’intensité de leur rayonnement dans une direction privilégiée.  Par exemple, si le panneau d’antennes est composé de 16 colonnes et de 16 lignes d’éléments rayonnants, alors, il sera possible d’augmenter la puissance rayonnée par le faisceau de l’antenne, de 256 fois dans la direction choisie (par rapport au rayonnement d’un élément). 


Figure 1 : quelques exemples de réseaux phasés : de gauche à droite et de haut en bas, Radar dans le fuselage du Rafale, Radar sur la surface d’un bâtiment, station de base 5G et système EMBRACE 

Une antenne à réseau phasé utilise le principe de l’association des champs d’une multitude de sources à une certaine distance. Généralement, donc, ces antennes sont conçues comme une association d’antennes de même forme et de même dimension. Dans ce cas, l’ensemble des antennes constituant le réseau présentent à la fréquence de résonance voulue le même type de rayonnement EM intrinsèque. Les rayonnements produits par chaque élément s’associent en phase pour augmenter le rayonnement de l’antenne globale dans une direction choisie. Pour offrir une grande directivité du faisceau formé par le panneau, certaines caractéristiques topologiques sont à respecter :

  • au regard de l’espace que les éléments doivent avoir entre eux (positionnement dans le panneau) ou de leur longueur d’onde,
  • au regard de la loi d’illumination des éléments rayonnants du panneau : 
    • en amplitude lorsqu’il s’agit de modifier la forme du diagramme : hauteur et largeur du lobe principal, écart entre lobe principal et lobe secondaire,
    • en phase lorsqu’il s’agit d’orienter le faisceau électronique dans différentes directions.

Figure 2 : illustration de la formation du faisceau par association des champs de chaque élément rayonnant 

Quelle différence entre antennes active et passive ?

La différence fondamentale est le rayonnement des antennes. Une antenne passive émet de façon homogène et constante sur les azimuts en minimisant les rayonnements vers le ciel ou vers le sol à l’aplomb de l’antenne, la couverture, comme vu précédemment pourrait être schématisée comme une portion de disque, plus ou moins large, inclinée vers le sol. On peut donc considérer que la puissance globale rayonnée par l’antenne est distribuée sur les azimuts. Par ce biais, tous les utilisateurs qui sont dans cette couverture azimutale peuvent communiquer avec la station de base, mais la puissance reçue par chacun d’entre eux est limitée.

Dans le cas des antennes actives, ce n’est plus le cas, seule la direction où se situe l’utilisateur est visée, il n’y a plus d’émission constante dans le temps sur tous les azimuts, mais uniquement sur l’azimut où se situe le bénéficiaire. Si les antennes actives et passives présentaient les mêmes caractéristiques, on pourrait imaginer que l’énergie reçue par l’utilisateur d’une station équipée d’une antenne active recevrait l’ensemble de l’énergie que l’ensemble des utilisateurs de l’antenne passive pourrait recevoir.

En pratique, la situation est bien plus complexe, car deux situations peuvent apparaitre :

  • La première consiste au fait que l’antenne créé plusieurs faisceaux  indépendants pour couvrir les utilisateurs. Chacun de ces faisceaux est formé par des sous-ensembles de la matrice d’éléments rayonnants et utilise la totalité de la bande passante disponible. 
  • La seconde revient à subdiviser la bande passante  (sur laquelle rayonnant l’antenne) en sous-bandes attribuées à chaque utilisateur mais où chaque faisceau formé utilise alors tous les éléments rayonnants du panneau.


Il peut aussi être question parfois d’une combinaison des deux  idées précédentes. Par exemple, en reprenant le cas d’une matrice présentant 256 éléments rayonnants (16 en lignes et 16 en colonne), rien n’empêche d’imaginer que 4 faisceaux soient formés simultanément par 4 sous matrice de 64 éléments (8 en lignes et 8 en colonne) et que donc 4 utilisateurs se partagent  la puissance rayonnée  globale de l’antenne. 

Figure 3 : rayonnement d’une station de base passive (à gauche) et d’une antenne active (à droite). Il faut considérer que dans le cas de l’antenne 4G, le faisceau est fixe et qu’il est mobile (quasiment perpétuellement) pour le cas 5G

Pourquoi la 5G nécessite ce genre d’antenne ? 

L’idée première de la 5G pour les applications à très haut débit2 (Enhanced Mobile BroadBand EMBB) est de fournir une grande quantité d’information en un temps très court. Pour que cette prouesse soit possible, il est nécessaire de disposer d’une importante largeur de bande pour écouler le débit attendu. 

Une telle contrainte oriente l’usage de telles applications à des fréquences dites de « grande capacité » (>3GHz) où le spectre contigüe y est disponible. Toutefois, comme les pertes de propagation de l’onde radio s’accroissent également avec la fréquence, l’augmentation de la directivité des antennes apparaît incontournable pour compenser ces atténuations et conserver des tailles de cellules raisonnables (entre quelques centaines de mètre à quelques km suivant les fréquences considérées). Par ailleurs, la figure 3 nous permet d’observer qu’une antenne est d’autant plus directive que son gain maximum est élevé. Ainsi, lorsque les utilisateurs à couvrir sont en mobilité, le faisceau directif (et étroit) de l’antenne doit être capable de suivre ce dernier. On parle alors d’antennes intelligentes car le balayage du faisceau doit être réalisé en temps réel, ce qui ne peut être fait qu’électroniquement ; ce qui explique le recours aux antennes actives.

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Notes 

1)  vectoriel
2)  de l’ordre de plusieurs Gigabits/s