Lutte contre le changement climatique : quel rôle pour la politique européenne du spectre ?
La politique européenne du spectre engage une réflexion sur la lutte contre le changement climatique. Ce thème, à l’ordre du jour du programme 2020-21 du groupe européen sur la politique du spectre (RSPG), s’inscrit dans une tendance de fond commune à tous les secteurs pour les prochaines décennies. La nouvelle Commission européenne, mise en place à l’automne 2019, s’est engagée dans un ambitieux Pacte vert (Green deal) dont la feuille de route a été publiée en fin d’année 2019. La Commission a formulé ses premières propositions, qui recouvrent un large périmètre : énergie propre, industrie durable, construction et rénovation, mobilité durable, biodiversité, chaîne alimentaire et réduction de la pollution.
Comment la gestion du spectre peut-elle contribuer à ces enjeux dans le cadre des futurs débats communautaires ? Elle pourrait prendre en compte plusieurs axes.
Tout d’abord, les besoins en fréquences dans les secteurs de l’énergie, du transport ou de l’urbanisme :
Les acteurs de l’énergie, les secteurs industriels en mutation, les villes intelligentes et les transports publics ont besoin de ressource spectrale. Les États membres, via les travaux du RSPG, peuvent recommander à la Commission, lorsque c’est nécessaire, une harmonisation européenne de ces fréquences. Cet exercice devra être mené après une consultation des acteurs concernés, en tenant compte des analyses du RSPG déjà exploitables : Internet des objets, transports intelligents et besoins sectoriels.
Le secteur de l’énergie fera l’objet d’une attention particulière. Les acteurs exploitent déjà de nombreux réseaux radio point-à-point ou point-multipoints bas débit, voire des liaisons satellites. Leurs besoins en fréquences sont liés aux nouveaux modes de production d’énergie, de collecte de données et de commande/supervision de réseaux résilients. Mais de nouveaux besoins ont émergé avec les réseaux smart grid et les nouveaux outils de mesure de la consommation à distance. Les travaux à venir permettront d’identifier les différentes initiatives nationales et ces nouvelles attentes des acteurs de l’énergie. Des actions à engager au niveau communautaire seront alors proposées pour dépasser le cadre national et l’harmonisation volontaire qui prévalent aujourd’hui.
La protection des systèmes qui contribuent aux prévisions météorologiques et au suivi du changement climatique :
Le RSPG a mené il y a plusieurs années une analyse sur les services scientifiques. Elle devra être actualisée afin de refléter l’importance croissante de la protection internationale de ces services dont nombre d’entre eux contribuent aux prévisions météorologiques, notamment ceux de Copernicus et Eumetsat. Les débats de la dernière Conférence mondiale des radiocommunications 2019 sur le risque de brouillage par la 5G de la bande passive 23,6-24 GHz utilisée pour les prévisions météorologiques illustrent ce lien entre gestion des fréquences et changement climatique. Les systèmes utilisés par la météorologie (satellites, radars, sondes) sont mondiaux et devraient s’appuyer sur des règles de protection partout identiques.
L’évolution des technologies radio vers des technologies vertes :
La lutte contre le changement climatique suscite aussi une interrogation légitime sur la consommation énergétique des nouvelles technologies. Jusqu’à présent, les technologies mobiles ont été comparées en termes de débits offerts ou d’efficacité spectrale. Ici, il conviendra de s’interroger sur l’efficacité des technologies radio et l’impact énergétique des usages qu’elles stimulent. De nombreuses questions sont ouvertes. Comment qualifier une technologie de « technologie verte » ? Comment favoriser une migration vers ces technologies ? Faut-il l’imposer ou seulement la recommander ? Quels outils réglementaires employer pour cela ?
L’impact de la normalisation européenne ou internationale :
Dans les communications de la Commission européenne déclinant progressivement les points d’action du Pacte vert (transports ou industries, par exemple), le groupe évaluera la pertinence d’une contribution sur les fréquences.
L’ANFR anime la réflexion nationale et élabore avec les affectataires la position française défendue dans le cadre de ces travaux européens. Elle pourra solliciter si nécessaire des acteurs français pour intervenir dans le cadre d’ateliers européens qui vont nourrir cette première phase de réflexion.