Le feu vert à l’harmonisation de la bande 6 GHz pour les WAS/RLAN
La stratégie numérique de l’Europe repose sur le déploiement de réseaux et services de communication électronique pour favoriser le développement économique des différents secteurs. Les réseaux locaux sans fil sont l’un des moyens d’accès à l’internet, et concourent donc au développement du marché unique, à la croissance économique et à l’innovation1. D’ici 2025 la Commission Européenne souhaite garantir une connexion d’au moins 1 Gb/s aux services publics, écoles, entreprises et autres acteurs économiques. Dans les foyers, l’objectif est de proposer des connexions entre 100 Mb/s et 1 Gb/s2. La disponibilité du spectre radioélectrique représente un levier essentiel pour parvenir à ces objectifs. C’est pour cela que la Commission Européenne a mandaté3 la CEPT afin d’évaluer les possibilités techniques et réglementaires d’harmonisation de la bande 6 GHz (5 925 – 6 425 MHz) pour l’utilisation des WAS/RLAN, en d’autres termes essentiellement le Wifi.
Ces 500 MHz viendront accroître le spectre déjà ouvert au Wifi en Europe : les bandes 2,4 GHz (2 400 – 2 483,5 MHz) et 5 GHz (5 150 – 5 350 MHz et 5 470 – 5 725 MHz). Cependant, la bande 6 GHz est déjà utilisée par les faisceaux hertziens, le service fixe par satellite et la radioastronomie, et elle est adjacente à la bande des systèmes de transport routier intelligents (Road ITS) et de signalisation ferroviaire pour les trains urbains et de banlieue (CBTC). L’ouverture de la bande 6 GHz au Wifi n’est donc envisageable qu’à la condition de protéger ces usages.
Le projet de Rapport CEPT 73, première étape des travaux demandés par la Commission, en consultation publique4 jusqu’au 13 septembre 2019, présente les résultats d’études techniques concluant que le partage de la bande est possible sous certaines conditions techniques. En juin 2019, à la lumière de ce rapport, la CEPT a donné son « feu vert » à la préparation d’une Décision ECC d’harmonisation de la bande 6 GHz pour les WAS/RLAN. Pour autant, la définition des conditions techniques assurant cette coexistence avec les usages préexistants reste à préciser.
En effet, plusieurs points demeurent en débat. Par exemple, les critères de protection des faisceaux hertziens apparaissent inadaptés, car ils n’envisagent à ce jour que des pourcentages de temps soit très élevés (20 %), soit très faibles (de l’ordre de 0,001 %) ; pourtant, des études mettent en évidence des probabilités de brouillages culminant vers 1 % du temps. Vis-à-vis du service fixe par satellite, il s’agit aussi de tenir compte de l’effet agrégé de brouillages provenant du Wifi sur la réception des satellites, dont la protection reste une obligation internationale. Enfin, la protection du CBTC fait l’objet d’une attention particulière : afin de mieux assurer le découplage des bandes, il serait souhaitable de ne faire débuter le plan de canalisation de la bande pour le Wifi qu’à 5 945 MHz, ce qui ne remet pas en cause la possibilité pour le Wifi de disposer trois canaux de 160 MHz (ou 6 canaux de 80 MHz).
Afin de mieux assurer la protection de certains services et applications, l’Agence soutient le recours à une base de données gérant la coordination automatique des points d’accès WAS/RLAN en fonction de leur position géographique. Cela assurerait la protection des faisceaux hertziens, du CBTC (limitation des émissions Wifi dans le bas de la bande 6 GHz à proximité des voies ferrées urbaines) et de la radioastronomie (exclusion des WAS/RLAN autour des observatoires).
La deuxième étape des travaux sera lancée en septembre 2019. La CEPT devra proposer des conditions techniques et réglementaires pour la future décision communautaire d’harmonisation des WAS/RLAN à 6 GHz afin d’assurer la coexistence entre Wifi et services ou applications préexistants. Ce rapport ainsi que la Décision ECC correspondante sont attendus pour juin 2020.
L’harmonisation de la bande 6 GHz pour le Wifi apparaît comme une occasion de mettre en œuvre des mécanismes innovants de partage dynamique du spectre, grâce à une base de données de géolocalisation. Si cela s’avère concluant, ce procédé devrait permettre de multiplier les opportunités de partage du spectre dans d’autres bandes.
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1 Programme pluriannuel en matière de politique du spectre radioélectrique. Décision 243/2012/UE du Parlement européen et du Conseil, du 14 mars 2012
2 COM(2016)587 final du 14/09/2016 – Connectivity for a competitive Digital single market – Towards a European Gigabit Society
3 Mandat de la CE DG CONNECT/B4 à la CEPT. Ref. Ares(2017)6222764 - 19/12/2017
4 Document en consultation public disponible sur le site web de la CEPT - https://cept.org/ecc/tools-and-services/ecc-consultation